Mandana du Rajasthan, "Jodhpur, la quête commence"— partie 1
C'est ainsi que commence pour moi la quête des mandana au Rajasthan. Les diagrammes peints comme ceux du Tamil-Nadu sont les témoins silencieux des nombreuses cérémonies et rites de passage de la culture indienne.
J’ai toujours eu comme vision du Rajasthan celle d’une terre relativement aride voire désertique où des palais et des forteresses imposantes se succèdent au rythme des pitons rocheux, mais la réalité géographique montre un visage bien différent. Les monts Aravalli divisent la région en deux parties distinctes. Ces reliefs bien que modestes arrêtent les pluies du sud-est et laissent l’ouest du Rajasthan sans précipitation alors qu’elles se déversent abondantes sur le versant oriental où poussent coton, lin, arachide, orge, blé et riz. À l’inverse, les montagnes immobilisent les vents chargés de sable du désert du Thar.
Je suis loin des terres méridionales que j’affectionne et c’est à Jodhpur, la ville bleue que commence ma quête des dessins de sol appelés mandana dans cette partie de l’Inde. Les seuils des maisons locales me semblent bien dépouillés en comparaison de ceux des maisons tamoules où fleurissent chaque jour des allégories géométriques. Pourtant c’est une peinture de sol élégante qui m’accueille sur le parvis d’une maison princière reconvertie en hôtel au luxe discret.
C’est ainsi que je fais connaissance avec certaines coutumes locales incarnées par le couple d'hôteliers. Les murs du couloir menant aux chambres dévoilent des tranches de vie de toute la lignée royale. Des trophées hippiques et des coupes de polo, gagnés par l’arrière-grand-père trônent parmi les portraits des ancêtres et les photos intimes de la famille. Un cliché en noir et blanc posé derrière une lampe à huile attire mon attention, car elle immortalise le père de mon hôte le jour de son mariage. On le voit debout, en tenue d’apparat, entouré de femmes parées de voiles diaphanes aux motifs délicats. Tenant son épée à deux mains, il touche du bout de la lame une assiette de métal posée sur un dessin peint sur le sol et composé de plusieurs carrés avec une fleur stylisée au centre. La photo vieillie révèle à peine ce diagramme mais la coutume rajpoute veut que le jour du mariage, le futur marié écarte des assiettes de métal pour se diriger vers la divinité de l'autel familial . La future épouse, qui lui emboîte le pas, doit les replacer une à une sur chaque case. Par ce geste, elle exprime ainsi sa capacité à être patiente et discrète en toute occasion au sein du foyer. Lui, manifeste son autorité en tant que chef de famille et sa capacité à protéger le foyer par la manière dont il déplace la vaisselle.
C'est ainsi que commence pour moi la quête des mandana au Rajasthan. Les peintures sur le sol comme celles du Tamil-Nadu sont les témoins silencieux des nombreuses cérémonies et rites de passage de la culture indienne. Naissance, mariage et autres fêtes du calendrier hindou sont autant d'occasions pour dessiner. Mais comment poursuivre cette recherche ? Après quelques échanges avec mes hôtes, ils me présentent deux frères agriculteurs de métier et guides occasionnels pour les clients de l'hôtel qu'ils emmènent dans leur jeep à la découverte des communautés Bishnoï, (paysans vishnouites attachés à la protection de la nature et vouant un respect profond pour les arbres). L’un d’eux accepte de me guider et je me mets en route dès le lendemain avec l’espoir de contempler dans la cour des maisons, des mandana annonçant la fête des lumières appelée Diwali.
Histoire à suivre…